EXPLOITATION FAMILIALE DES TERRES BLANCHES
L'exploitation de la terre blanche n'a pas cessée avec la disparition des potiers.
De nombreux petits exploitants, ont continué la mise en valeur des mines, pour en extraire la terre réfractaire et le précieux kaolin. Les surfaces exploitées étaient parfois minuscules, et il fallait creuser des trous de plusieurs mètres de profondeur, plus ou moins bien étayés, à proximité du ruisseau de Crozes qui fournissait l'eau indispensable au délavage.
Le kaolin était obtenu par décantation de la terre blanche préalablement tamisée, dans des fosses ou bassins remplis d'eau. Il fallait une grande quantité d'eau pour assurer l'extraction, dans une région ou celle-ci est plutôt rare.
Ceci n'allait pas sans querelles ni procès, certains exploitants étant accusés de détourner le ruisseau à leur profit.
Une fois extrait, le kaolin était mis à sécher dans de grandes tuiles, elles-mêmes entreposées dans des séchoirs à l'air libre, bien que pourvus de toits et partiellement bardés de planches, de façon à permettre une ventilation maximale tout en protégeant de la pluie.
Les documents de la fin du XIXème Siècle montrent ainsi de nombreux baraquements en bois, destinés au séchage du kaolin, de part et d'autre du ruisseau de Crozes, autrefois appelé ruisseau d'humilian, donnant au paysage un aspect typique.
A cette époque, les espaces boisés qui couvrent aujourd'hui ce secteur n'existaient pas, et l'on pouvait voir les collines de terres blanches réfléchir de manière éclatante le soleil d'été.
L'exploitation des terres blanches ne se limitait pas à l'extraction du kaolin, produit particulièrement raffiné. Sous une forme plus grossière, après un simple tamisage, elle permettait la fabrication de produits réfractaires divers, tels que les briques utilisées pour la fabrication des fours à pain.
Les équipements utilisés pour extraire le matériau brut étaient le pic, la pioche, la pelle, la brouette.
Il n'est pas rare, aujourd'hui encore, de trouver des fragments de ces poteries à même le sol, aux alentours du village et jusqu'au quartier des Sautons.
La terre brute, avant d'être tamisée, était préalablement broyée, afin de séparer le gravier brut de l'argile plus fine. La terre blanche était étalée sur une grande aire circulaire de 10 à 15 mètres de diamètre.
Le broyage était effectué à l'aide de grosses meules en pierre, de forme cylindrique, tirées par des chevaux.
Derrière le rouleau était attelée un petite herse en bois qui permettait d'éviter un trop grand compactage de la terre. Le broyage s'effectuait en trois séances d'une quinzaine de minutes. Entre chaque séance, la terre était raclée à l'aide d'une lame de décompactage, puis, elle était roulée à nouveau.
La terre blanche, après extraction et broyage, était amassée en vastes anneaux, au centre desquels étaient installés des tamis. Au fur et à mesure que s'effectuait le tamisage, un tas de terre affinée se constituait au centre des anneaux.
Les tamis, qui étaient poussés manuellement, effectuaient une rotation afin de traiter la terre sur toute la circonférence où elle était disposée.
Ces tas de terre augmentaient au fil du temps et des quantités de terre blanche traitées. Ils diminuaient lorsque des livraisons aux fabriques de briques réfractaires intervenaient.
Les livraisons n'étaient pas toujours concomitantes à l'affinage de la terre. Les carrières étaient de ce fait parsemées de monticules coniques de terre affinée, en attente de livraison. Le stockage de la terre à l'extérieur, malgré les intempéries, ne nuisait pas à sa qualité. Ce n'était pas le cas du kaolin qui nécessitait un lieu de stockage abrité.
Le transport de la terre raffinée, après tamisage, s'effectuait dans des charrettes appelées "tombereaux", pouvant contenir 1 mètre cube de terre, soit environ 1,2 tonnes.
La traction animale était le plus souvent assurée par des mules ou des mulets, ces derniers étant plus dociles que les mules, plus rarement par des chevaux, réputés moins rustiques, moins adaptés aux sentiers escarpés, moins intelligents aux dires de certains utilisateurs, mais plus adroits dans le coup de pied.
L'extrême chaleur qui régnait dans les carrières, liée à la réverbération sur la surface blanche, rendait le travail très pénible.
Le gravier brut, trop gros pour passer entre les mailles du tamis, était récupéré dans une brouette.
Sur les bords du tamis étaient disposées des bâches, dont la fonction était d'éviter que la terre pulvérisée ne s'envole. Après utilisation, ces bâches étaient enroulées contre les bords supérieurs du tamis et attachées.
La terre blanche était livrée aux fabriques locales de briques réfractaires à Larnage ou Tain l'Hermitage. Le kaolin était également livré, dans la région de St Uzes, où s'était développée l'industrie de la céramique au XIXème Siècle.